
Nous apprenons aux filles à se diminuer, à se sous-estimer. Nous leur disons : tu peux être ambitieuse, mais pas trop. Tu dois viser la réussite, mais pas trop. Tu dois viser la réussite sans qu’elle soit trop spectaculaire, sinon tu seras une menace pour les hommes.
La valeur n’attend pas le nombre des années, et c’est pour cela que Chimamanda Ngozi Adichie fait partie de mes figures incontournables. Bien qu’elle soit plutôt jeune et n’ait pas publié pléthore de textes, c’est une autrice particulièrement talentueuse, acclamée mondialement et déjà icône presque malgré elle. Sa vision du féminisme, exposée en 2012 dans une conférence TEDx intitulée « We should all be feminists » devenue culte, a été reprise et réutilisée par des féministes du monde entier, mais aussi par le monde de la mode et de la chanson. Un drôle de mélange des genres parfois, qui ne doit pas faire oublier la puissance de ce discours, et de son engagement.
Chimamanda Ngozi Adichie pense son époque, et son expérience en tant que Nigériane expatriée un temps aux Etats-Unis. Par ses récits, elle nous donne à voir une autre vision du continent africain contemporain, et offre une réalité à un impensé commun, ces images occidentales faussées et fantasmes qui persistent autour du Nigeria et bien plus largement du continent africain, dont Rudyard Kipling disait que ses habitants étaient « mi-diable, mi-enfant ».
Les histoires ont été utilisées pour briser et pour calomnier. Mais elles peuvent aussi être utilisées pour renforcer, et pour humaniser.
Son oeuvre traite des notions d’exil, de l’héritage du colonialisme, de double culture, de préjugés autour des cultures africaines dont elle a souffert elle-même, et interroge la place des femmes dans les sociétés actuelles.
Qui est Chimamanda Ngozi Adichie ?
Née en 1977 à Enugu (Nigeria), Chimamanda Ngozi Adichie a été très tôt marquée par son histoire familiale, ayant grandi sans grands-parents maternels ni paternels, tués pendant la guerre du Biafra. Elève brillante, elle part à dix-neuf ans aux Etats-Unis pour suivre des études de communication, de sciences politiques, et intègre un master en création littéraire à l’Université John Hopkins de Baltimore, pour enfin obtenir une maîtrise en arts d’études africaines à Yale. Parallèlement elle connaît le succès littéraire avec la publication de son premier roman L’hibiscus pourpre, en 2003.
On lit quoi ?
- L’autre moitié du soleil (2006) : l’autre moitié du soleil, un demi-cercle jaune censé représenter un nouveau pays, porteur d’espoir pour une partie de la population Nigériane dans les années 1960, le Biafra. Nous suivons dans ce roman de guerre virtuose et complexe le destin de deux soeurs jumelles, Olanna et Kainene, prises dans la guerre civile sanglante qui éclatera entre les partisans du Biafra et ses opposants. C’est un récit à portée universelle sur les ravages des conflits armés sur les civils, quels qu’ils soient.
- Nous sommes tous des féministes (2012) :
«Partout dans le monde, la question du genre est cruciale. Alors j’aimerais aujourd’hui que nous nous mettions à rêver à un monde différent et à le préparer. Un monde plus équitable. Un monde où les hommes et les femmes seront plus heureux et plus honnêtes envers eux-mêmes. Et voici le point de départ : nous devons élever nos filles autrement. Nous devons élever nos fils autrement ». Une réflexion éloquente et inspirante sur le féminisme, présenté ici en format texte.
- Americanah (2013) : Ifemelu quitte son Nigeria natal et son grand amour Obinze pour faire ses études à Philadelphie (Etats-Unis). Ele se retrouve confrontée alors au racisme et à la discrimination, dans ce pays où elle découvre qu’elle est noire, et différente. Ayant du mal à trouver sa place dans ce pays d’accueil, elle se sent également décalée par rapport à son pays d’origine, où on l’accuse d’être une « Americanah ». Comment savoir qui l’on est lorsque l’on ne se sent plus soi-même nulle part ? Un roman sans concession sur l’identité, et l’exil, tiré en partie de l’expérience personnelle de l’autrice.
Mais aussi…
The Danger of a Single Story (« Le danger d’une histoire unique »), conférence TEDx tenue en 2009:
« Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse ne peuvent que chanter la gloire du chasseur ». Chimamanda Ngozi Adichie explore ici la notion d’Histoire, et son impact dans la construction de chacun lorsqu’elle est dite d’une seule voix.
Pour aller plus loin, une autre recommandation littéraire s’impose , Tout s’effondre de Chinua Achebe, l’un des plus grands auteurs Nigérians. L’Histoire de la colonisation et de sa violence vue du côté des colonisés. Indispensable.
Une auteur que j’apprécie énormément également. J’ai aimé « L’hibiscus pourpre » et » Americanah ». Il faudrait que j’attaque enfin « L’autre moitié du soleil », en attente dans ma biblio !
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Oui je te le conseille vivement, alors après je ne vais pas te mentir il est très triste, mais vraiment à lire
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