
L’année 2021 est passée en un éclair, et bien que 2022 soit déjà un peu engagée, voici un retour sur les dix lectures qui m’ont le plus marquée durant cette année. Il fut difficile de choisir, mais j’espère vous donner envie de découvrir ces quelques pépites qui m’ont procuré de beaux moments de lecture.
S’y trouve une majorité de romans, dont une bonne partie étrangers, car comme vous aurez pu certainement le remarquer j’ai une vraie passion pour la littérature étrangère, mais aussi de la poésie, et de la bande dessinée ! Un beau cru pour cette année.
1 Brûler, brûler, brûler / Lisette Lombé. L’Iconoclaste, 2020

Résumé : « Une voix puissante qui défend avec rage toutes les minorités. Antiracistes, féministes, politiques, les mots de Lisette Lombé font battre le pavé et le coeur. Le poing levé, à coups de mots et de collages, elle dénonce les injustices et poursuit le combat de ses aînées, d’Angela Davis à Toni Morrison. »
Mon avis : attention uppercut politique et poétique ! Avec sa plume flamboyante et ses idées bien trempées, Lisette Lombé, slameuse et poétesse belge, ne vous laissera sûrement pas indifférent.e. Je ne boude pas le plaisir de recopier ici un extrait pour vous donner envie de la découvrir :
« Un coeur libre«
Je suis une Bettie Page poscoloniale.
Une Vénus nègre aux lignes extravagantes
ayant fait exploser
sa ceinture de bananes
à la face de ses anciens maîtres.
L’oeil fauve,
je culbute tes réflexes de missionnaire blanc
et je trempe ma poitrine garçonne
dans la salive de tes préliminaires.
Sous ce téton pointu,
c’est un cœur libre que tu mordilles.
2 Les Vilaines / Camila Sosa Villada. Métailié, 2021

Résumé : « La Tante Encarna porte tout son poids sur ses talons aiguilles au cours des nuits de la zone rouge du parc Sarmiento, à Córdoba, en Argentine. La Tante – gourou, mère protectrice avec des seins gonflés d’huile de moteur d’avion – partage sa vie avec d’autres membres de la communauté trans, sa sororité d’orphelines, résistant aux bottes des flics et des clients, entre échanges sur les derniers feuilletons télé brésiliens, les rêves inavouables, amour, humour et aussi des souvenirs qui rentrent tous dans un petit sac à main en plastique bon marché. Une nuit, entre branches sèches et roseaux épineux, elles trouvent un bébé abandonné qu’elles adoptent clandestinement. Elles l’appelleront Éclat des Yeux. »
Mon avis : une fresque truffée de réalisme magique nous transporte si loin, on espère, on vit, on tremble avec et pour elles. Camila Sosa Villada a puisé dans son expérience personnelle pour écrire ce livre si joyeux et triste à la fois, fantasque et désespéré, où chaque personnage lutte pour aspirer simplement au bonheur. Beau et bouleversant. Ma chronique en entier ici.
3 Le Palais de glace / Tarjei Vesaas. Actes Sud, 2016 (initialement paru en 1963)

Résumé : « Au cœur d’un paysage glacé de Norvège, deux fillettes, Unn et Siss, se rencontrent et se reconnaissent. Face à un miroir, elles scellent un pacte qui les unit à jamais, avant qu’Unn ne disparaisse mystérieusement. »
Mon avis : découvert grâce au bookclub « Ce mois-ci on lit » du merveilleux compte Instagram d’Oxyne V. Pâlir au soleil, ce chef d’œuvre de la littérature norvégienne m’a éblouie. Un très beau récit symboliste, énigmatique et troublant, aux interprétations multiples et ouvertes, qui transforme un simple événement tragique en conte aux accents de réalisme magique.
4 Arcadie / Emmanuelle Bayamack-Tam. Folio, 2020 (paru initialement en 2018)

Résumé : « Au domaine de Liberty House réside une étrange communauté : naturistes, électrosensibles, déments séniles et autres inadaptés y réapprennent à vivre et jouir sans entraves. C’est là que Farah, quatorze ans, et ses parents ont trouvé refuge. Mais au milieu de ce drôle de paradis, l’adolescente peine à s’épanouir. Et pour cause : sa seule certitude – être une fille – vient de voler en éclats. »
Mon avis : ce roman sur le passage à l’âge adulte nous questionne intelligemment sur les normes, l’amour et la liberté, et tout cela avec humour à travers les yeux de Farah, personnage haut en couleurs extrêmement attachant.
5 Le choix / Désirée et Alain Frappier. La ville brûle, 2015

Résumé : «Pourquoi ces voyages en train qui l’emmènent toujours ailleurs, avec pour seule compagnie une valise et une carte famille nombreuse ? Pourquoi ce sentiment de n’être jamais à sa place ? Pourquoi ce slogan réclamant le droit à l’avortement semble-t-il lui être adressé ? Pourquoi ce prénom si peu approprié ? Les réponses à ces questions se trouvent au fond d’un carton oublié dans le grenier de la maison familiale.»
Mon avis : bien que ce ne fut pas une découverte mais une relecture, je ne peux m’empêcher de mentionner cette bande dessinée dans ce top dix tout simplement pour qu’elle soit lue par le plus grand nombre. Un récit poignant sur l’avortement, qui mêle habilement histoire personnelle et retour historique, sur les luttes menées par les femmes en France pour obtenir ce droit.
6 Les ombres filantes / Christian Guay-Poliquin. La Peuplade, 2021

Résumé : « Dans la forêt, un homme seul marche en direction du camp de chasse où sa famille s’est réfugiée pour fuir les bouleversements provoqués par une panne électrique généralisée. Il se sait menacé et s’enfonce dans les montagnes en suivant les sentiers et les ruisseaux. Un jour qu’il s’est égaré, un mystérieux garçon l’interpelle. Il a une douzaine d’années, semble n’avoir peur de rien et se joint à l’homme comme s’il l’avait toujours connu. L’insolite duo devra affronter l’hostilité des contrées sauvages et déjouer les manigances des groupes offensifs qui peuplent désormais les bois. »
Mon avis : Christian Guay-Poliquin revisite et mêle habilement Nature writing et roman post-apocalyptique dans cette aventure haletante et puissante, qui questionne également notre vision de la famille et notre attachement à la nature. Retrouvez ma chronique ici.
7 Poussière dans le vent / Leonardo Padura. Métailié, 2021

Résumé : « Ils ont vingt ans. Elle arrive de New York, il vient de Cuba, ils s’aiment. Il lui montre une photo de groupe prise en 1990 dans le jardin de sa mère. Intriguée, elle va chercher à en savoir plus sur ces jeunes gens. Ils étaient huit amis soudés depuis la fin du lycée. Les transformations du monde et leurs conséquences sur la vie à Cuba vont les affecter. Des grandes espérances jusqu’aux pénuries de la « Période spéciale » des années 90, après la chute du bloc soviétique, et à la dispersion dans l’exil à travers le monde. Certains vont disparaître, certains vont rester, certains vont partir. »
Mon avis : un roman choral magistral qui déploie mille nuances sur l’exil, la perte, l’amitié et l’amour, et qui réussit à conjuguer brillamment fresque sociale et récit intime.
8 Sur les ossements des morts / Olga Tokarczuk. Libretto. 2020 (paru initialement en 2014)

Résumé : « Janina Doucheyko vit seule dans un petit hameau au cœur des Sudètes. Ingénieur à la retraite, elle se passionne pour la nature, l’astrologie et l’œuvre de William Blake. Un matin, elle retrouve un de ses voisins mort dans sa cuisine, étouffé par un petit os. C’est le début d’une longue série de crimes mystérieux sur les lieux desquels on retrouve des traces animales. La police enquête. Les victimes avaient toutes pour la chasse une passion dévorante. Quand Janina Doucheyko s’efforce d’exposer sa théorie sur la question, tout le monde la prend pour une folle… Car comment imaginer qu’il puisse s’agir d’une vengeance des animaux ? »
Mon avis : lauréate du prix Nobel de littérature en 2018, Olga Tokarczuk était une autrice qui m’intriguait depuis longtemps, mais il aura fallu attendre 2021, et le bookclub « Ce mois-ci on lit », pour me plonger dans son œuvre. Une belle découverte que ce roman assez inclassable, à la fois polar, pamphlet écologique et récit quasi ésotérique.
9 De feu et d’or / Jacqueline Woodson. Stock, 2021

Résumé : « Nous sommes en 2001, le soir d’une fête donnée en l’honneur de Melody et de ses seize ans, dans la maison familiale de Brooklyn. Couvée du regard par ses parents et amis, elle fait son entrée sur une musique de Prince, dans une robe blanche taillée sur mesure. Une tristesse flotte néanmoins dans l’atmosphère. Seize ans plus tôt, cette même robe fut cousue pour une autre jeune fille : Iris, la mère de Melody, pour fêter aussi son entrée dans l’âge adulte. Une célébration qui n’eut finalement jamais lieu. Iris était enceinte. »
Mon avis : Jacqueline Woodson explore ici l’identité noire dans sa construction et sa transmission des traumatismes intergénérationnels, mais célèbre également beauté et la résilience de toute une partie de la population américaine. Magnifique, organique, poétique et bouleversant. Retrouvez ma chronique ici.
10 Grandeur des îles / Odette du Puigaudeau. Payot, 2021 (paru initialement en 1946)

Résumé : « La grande voyageuse que fut Odette du Puigaudeau (1894-1991) a consacré sa vie au Sahara occidental, mais c’est parmi les marins et la population des îles bretonnes que l’aventure avait commencé pour la fille de Ferdinand du Puigaudeau, peintre de l’école de Pont-Aven et ami de Gauguin. «Grandeur des îles» rassemble ses notes et articles sur Ouessant, Groix, l’archipel de Molène et l’île de Sein, ces « fragments d’humanité amenés là par quelque rude et mystérieux hasard ». »
Mon avis : dans ce récit de voyage d’une grande beauté, Odette Du Puigaudeau rend hommage avec tact et justesse aux habitants de ces îles dont les conditions forcent à l’humilité. Une belle plume et une grande exploratrice, qui mériteraient d’être plus largement connues.
Votre commentaire